Aujourd’hui, la majorité des entreprises et institutions produisent et diffusent leurs propres contenus. Tandis que, pour diversifier leurs revenus, les médias vendent aux entreprises des contenus sponsorisés qui reprennent les codes journalistiques et s’insèrent dans le flux éditorial. Jadis bien définie, la frontière entre journalisme et communication est de plus en plus floue, ce qui soulève des questions sur la qualité de l’information disponible.
Journalisme et communication : des logiques différentes
Le journaliste enquête, vérifie ses sources, croise les faits et rend compte d’une réalité, aussi complexe soit-elle, avec pour objectif l’information du citoyen. Son travail ne consiste pas à relayer des informations brutes fournies par des tiers, mais à les contrôler, les contextualiser, les hiérarchiser et les rendre intelligibles pour le public. Même s’il ne peut jamais être totalement neutre, le journaliste est supposé respecter une éthique rigoureuse, à commencer par la vérification des faits.
De son côté, la communication vise à construire une image, à promouvoir et à convaincre. Qu’elle soit institutionnelle, politique ou commerciale, elle est par essence orientée. Les professionnels de la communication ne cherchent pas à représenter la réalité, mais plutôt à la façonner pour faire passer un message ou défendre un intérêt.
Une confusion croissante des genres
Aujourd’hui, la frontière entre ces deux disciplines semble poreuse, voire brouillée. D’une part, de nombreux médias dépendent de financements extérieurs – publics ou privés – ce qui peut influencer, voire biaiser, leur ligne éditoriale. D’autre part, les communicants s’approprient les codes journalistiques : formats narratifs, publications d’articles d’expertise ou de vidéos proches du reportage.
L’essor des contenus sponsorisés et du brand content accentue cette confusion. Ces formats hybrides, qui reprennent les codes journalistiques tout en poursuivant des visées promotionnelles, floutent la frontière entre information et communication commerciale. Certains médias vont même jusqu’à créer des départements « brand content » chargés de produire ces contenus pour les annonceurs. En théorie, la réglementation impose aux médias de mentionner clairement le caractère publicitaire ou sponsorisé d’un contenu. En pratique, ces mentions sont parfois discrètes, reléguées en bas de page ou formulées de manière ambiguë pour le grand public (« en partenariat avec… », « contenu proposé par… »). C’est ainsi que la communication infiltre peu à peu les médias, souvent sans que le public en soit conscient.
Par ailleurs, les journalistes, par manque de temps du fait de la réduction des effectifs dans les rédactions et de la pression du rythme de production imposé par le canal numérique, sont parfois contraints de s’appuyer davantage sur les informations fournies par les services de communication (communiqués de presse, dossiers de presse ou de briefings), au risque de réduire la qualité de l’information.
Dans ce contexte, les spécialistes des relations presse ont un rôle à jouer, notamment pour expliquer la différence entre information (via un communiqué de presse) et message promotionnel, certaines entreprises ayant parfois du mal à faire le distinguo.
Comment réduire la confusion entre journalisme et communication ?
Cette porosité accentue la perte de confiance du public, voire la méfiance, dans les médias. Si les gens ne peuvent plus différencier un article ou un reportage journalistique d’un contenu sponsorisé, c’est la crédibilité même de la presse qui est en jeu.
Face à cette confusion, le journalisme doit réaffirmer ses fondamentaux. La transparence sur l’angle éditorial et les sources de financement, la séparation claire entre rédactionnel et publicité, tout comme la signalisation claire et visible des contenus sponsorisés, sont indispensables.
Il est également essentiel de développer une éducation aux médias pour les citoyens, afin qu’ils puissent exercer leur esprit critique et identifier les biais informationnels.
Enfin, les professionnels des relations presse ont un rôle clé à jouer pour garantir le respect de l’éthique et de la déontologie de l’information, car leur rôle se situe à l’intersection du journalisme et de la communication.
